Cette journée avait très bien commencé, Aurore s’était levée un peu plus tard que d’habitude vers cinq heures du matin et comme d’habitude elle était de très bonne humeur. Elle s’animait dans sa chambre Equulus suivant le rythme, elle avait hâte de choisir sa tenue et préparer ses sacs pour sa sortie. Elle avait décidé d’aller faire du camping dans les plaines d’espérance, elle avait lu quelque part que si on y observait sept coucher et lever de soleil cela nous porterait bonheur, ce qui serait très agréable. Elle courait donc de droite à gauche en écoutant de la musique, dansant, sautant et essayant de chanter. Elle hésita, ça aussi comme d’habitude, longtemps avant de trouver sa tenue, mais elle trancha pour une petite robe noire, un manteau de style militaire rouge, des petites ballerines noires ainsi qu’un de ses fameux chapeaux ; un haut-de-forme noir orné de roses rouges. Elle embarqua un nombre assez conséquent de tenues dans ses valises et les descendit une à une.

Elle passa ainsi douze fois devant le tableau de missions de la guilde et à chaque fois elle ne pouvait s’empêcher de ressentir un petit sentiment de dégoût face à certaines affiches très imagées. Poussée à bout elle finit pas en saisir l’une d’entre elles, on semblait apercevoir l’image d’une araignée en illustration et le texte décrivait une situation cauchemardesque. La ville d’Oak Town était envahie par des araignées, Aurore s’imaginait alors à leur place ; seule dans la nuit froide recouverte d’araignées grimpantes. Elle hésita longuement, se représentant mentalement, en alternance, dans les plaines de l’espérance puis à Oak Town, le choix semblait assez simple, mais la volonté de bien agir d’Aurore eut raison de ses désirs. Sa décision était prise, cap sur Oak Town. Elle sortit alors en trombe persuadée d’être en charge d’une mission de la plus haute importance, elle invoqua Pictor puis à deux ils chargèrent le chariot créé par l’esprit et sans perdre un instant les moucons tirèrent le l’engin aussi vite que leurs membres le permettaient.

Elle ne voulait pas perdre un instant et bien qu’elle fût ballotée par les mouvements du chariot elle parvint à rédiger une lettre. Elle avait en chemin réalisé que la guilde de Blue Pegasus se trouvait non loin de sa destination ce qui lui avait fait penser à Léo, il pourrait sûrement l’aider à venir à bout de cette mission. Ils s’étaient souvent retrouvés dans des situations assez gênantes tous les deux, la forêt d’Iria étant un sujet à éviter absolument … de plus elle espérait qu’à Oak Town ils puissent enfin prendre ce café promis et tant attendu. Elle avait donc pris une feuille de papier rose parfumée à la noix de coco et écrivit à l’encre couleur prune :

« Cher Léo,
Cela fait de nombreux jours que nous ne nous sommes pas vus, j’espère que tout se passe bien pour toi.
Je suis en ce moment à Oak Town pour une mission, si cela t’intéresse rejoins moi à l’orée de la forêt de Waas demain matin à 8h00.
Je serais ravie de recevoir ton aide et nous pourrions ensuite boire ce café !
Très cordialement,
Aurore Assno. »

L’écriture était tremblante et à certains moments des traits erratiques s’échappaient des lettres ; inconvénient d’écrire à l’arrière d’un chariot tiré par des moucons au galop. Elle arriva en fin de journée et eut le temps de déposer sa lettre à la guilde de Léo et de s’installer à l’auberge. Le lendemain matin elle enfila sa tenue qu’elle avait préparée la vieille ; une robe camouflage, des bottes de marche très élégantes et un béret gris posé sur ses cheveux rassemblés en chignon. Sa mallette noire en main, contenant sa peluche, elle se dirigea vers le point de rendez-vous très fière de son allure.

Aurore s’était réveillée très tôt ce matin-là et était également arrivée très tôt sur son lieu de rendez-vous. Elle ressentait une certaine anxiété, non pas due au fait qu’elle s’apprêtait à réaliser sa première mission en tant que mage, mais de revoir Léo. Leurs rencontres semblaient destinées à finir en catastrophe et dans toutes ces situations aucune n’avait mis la jeune fille réellement en valeur, au contraire elles s’acharnaient à détruire ce qu’il restait de son estime de soi. Elle avait donc eu suffisamment de temps pour préparer mentalement sa journée ; Léo la rejoindrait, ils iraient à deux dans la forêt trouveraient la pondeuse et l’extermineraient rapidement pour être de retour à Oak Town en début de soirée. Bien sûr tout cela aura été exécuté avec la plus grande élégance et démonstration de force de la part d’Aurore.

Léo : Chalut Aurore, Comment tu vas ? Cela faisait...

Amandil : Oh ? Mais qui vois-je ? Une valseuse serpent et un chat poney ? Que faites-vous là ? Vous allez attirer les Arachnis, surtout toi valseuse, avec ton parfum qui empeste. Toi aussi ''Petit Poney'', tu sens le poisson pas frais !

Le jeune homme ne s’était pas trop fait attendre. Elle était, comme à son habitude, perdue dans ses pensées lorsqu’il vint la rejoindre, et le revoir après tant de temps lui procura un immense plaisir, qui se manifesta par un grand sourire. L’attente lui avait laissé le temps de nourrir ses angoisses, elle pensait que Léo ne viendrait pas, qu’il la trouvait bien trop bizarre pour être fréquentable, mais il fit mentir ces doutes. Son plan allait pouvoir fonctionner à merveille ! Malheureusement un nouvel arrivant interrompit ces retrouvailles. La voix qui se fit entendre semblait familière à Aurore, elle tourna quelques tours sûr elle-même avant de trouver la personne qui parlait ; elle volait sur un balai. Elle dût admettre que ce moyen de locomotion ne manquait pas de style, cependant les propos qu’elle tenait ne lui plaisait pas réellement, elle n’était pas très polie. Aurore sursauta au mot « valseuse », une connexion s’établit et elle fit le lien avec l’odieuse femme qui avait ennuyer Jet lors du bal de Noel ! Elle ne voyait pas son visage, mais elle en aurait mis sa main à couper, tout s’expliquait.

Léo : La démone... Qu'est-ce que tu fais là ? Je n'ai pas souvenir que tu aies été conviée. Que tu m'embêtes moi tout seul, c'est une chose, mais ne t'attaques pas à Aurore.

Léo : Ignores là Aurore. Elle ne sait pas se tenir. Où j'en étais ? Ah oui, je disais que cela faisait longtemps que l'on ne s'était pas vu. J'étais vraiment content de recevoir une lettre de ta part.

Alors qu’Aurore cherchait la meilleure combinaison de mots pour à la fois ridiculiser cette mégère et impressionner Léo, le mage intervint. Il semblait la connaître, mais ils n’étaient pas en bon termes, décidément cette femme savait s’attirer de mauvais sentiments. Elle rougit même lorsqu’il prit sa défense, mais reprit sa contenance lorsqu’il redirigea son regard dans le sien, elle se redressait et l’écoutait attentivement la tête haute, l’air forte. Son idée lui plaisait, sa maman avait l’habitude de lui conseiller de répondre aux imbéciles par le silence, parce qu’ils n’en valaient pas la peine et que ça les énervait encore plus. Elle espérait bien qu’en l’ignorant la pimbêche s’énerve. Elle se tourna donc complètement vers Léo et lui répondit.

Aurore : Oui, ça fait trop longtemps même, elle souriait un peu niaisement en pensant avoir l’air intelligente. J’espèr..

« - Oh Mis- Attention ! »

Elle fut interrompue par un cri. Son regard se posa sur le visage de l’inconnu qui venait de les interpeller, puis son regard suivit celui de l’homme dans la direction de la forêt. Le soleil n’était pas encore complètement réveillé, une lumière encore orangée éclairait l’orée de la forêt. Son regard cherchait un mouvement, une forme ou un signe de vie entre les arbres, mais elle ne voyait rien. Au moment où elle allait abandonner elle aperçut une forme, non deux dans l’herbe, elle n’eut pas besoin de beaucoup de temps pour les identifier ; des araignées.

Prise de panique elle sursauta en lâchant un petit cri d’effroi. Réalisant ce qu’elle venait de faire, elle se ressaisit aussitôt et s’efforça de donner une image de mage professionnelle. Elle ne pouvait s’empêcher de se maudire intérieurement, évidemment qu’il y aurait des araignées, c’était l’objectif de la mission, idiote ! Elle prit alors les devants et passa à l’offensive, elle ne devrait pas trop avoir de mal à les mettre hors combat et ça lui ferait gagner des points auprès de Léo s’il pensait qu’elle était capable de se battre.

Aurore : Ouvre-toi porte de la table, Mensa !

L’esprit céleste se matérialisa aux côtés d’Aurore, les deux amis échangèrent rapidement des salutations puis demanda à Mensa d’éliminer les araignées qui se trouvaient devant eux. Chargeant sa corne d’abondance en magie, Mensa ne perdit pas un instant et envoya, en rafale, une quantité conséquente de noix de coco et ananas vers ses cibles. Aurore, posait ses poings sur ses hanches et jubilait intérieurement.

Aurore avait été assez surprise par les araignées, bien évidemment ces créatures étaient la raison pour laquelle elle se trouvait là, mais Léo l’avait un peu détournée de sa première motivation et l’arrivée d’Amandil n’avait fait que rajouter de la confusion. Heureusement elle avait bien réagi, invocation exécutée en toute élégance, stratégie de combat appropriée, la totale elle était fière d’elle. Cependant l’apparition de quatre squelettes de canidés l’a fit sursauter en direction de Léo, leur apparence macabre ne manqua pas de l’interpeller. Elle se demanda d’abord d’où ces animaux avaient pu survenir, mais elle réalisa assez vite que c’était du fait d’Amandil. Cela semblait d’une évidence frappante, cette magie dont elle ne connaissait rien convenait parfaitement à cette femme ; elle pouvait s’habiller et se présenter comme une femme charmante au fond elle restait pourrie à l’intérieur.

Elle eut du mal à l’admettre, mais ses abominations restaient efficaces, elles vinrent à bout de deux autres araignées qui avaient échappées au regard d’Aurore. Elle ne put s’empêcher de se sentir sotte, mais l’inconnu l’arracha à sa honte. Elle bombait légèrement le torse et redressait la tête en acceptant ses remerciements, mais elle ne manqua pas de minimiser son implication en toute humilité.

Elle fut surprise de se voir tirée par le bras, elle n’avait pas l’habitude de ce genre de réactions de la part de la gente masculine, il n’était pas réellement à son gout de surcroit. Elle s’empressa de saisir sa mallette et jeta un regard en arrière vers Léo, mais ne put apercevoir que la tête de cette rabat-joie. Aurore fronça les sourcils en essayant de voir par-dessus son épaule, mais la nature ne l’avait pas doté d’une très grande taille, elle maudit sa taille intérieurement.

Aurore se retrouva assise dans une auberge aux côtés d’Amandil, sans Léo, elle ne se sentait plus aussi à l’aise et elle commençait à s’inquiéter pour son homme-chat. Le vieil homme ne perdit pas de temps et entra dans le vif du sujet, donnant à Aurore une opportunité d’occuper son esprit. Elle écoutait attentivement ce qu’il disait, hochant régulièrement la tête et prenant en note dans son petit carnet les mots qui semblaient importants. Elle sentait le désarroi que la situation générait et elle cela la peinait tout autant. A cet instant Aurore oubliait ce qui se trouvait autour d’elle, elle avalait ses paroles et brûlait en son sein une fierté, celle d’être une mage accomplie chargée d’une mission pour le bien de tous.

Une fois la tirade de l’homme terminée elle saisit une de ses mains ridées et plongea son regard dans le sien et lui adressa la parole avec toute l’ardeur qui la caractérise :

Aurore : Ne vous inquiétez plus ! Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous débarrasser de ces araignées ! elle se tourna ensuite vers Amandil pur lui chuchoter à l’oreille Je ne sais pas ce que tu es venue faire ici, mais si tu as un cœur j’espère que tu m’aideras.

Elle finit sa phrase dans un léger soupir, un soupir de sincérité ; elle avait beau avoir nourrit son ressentiment envers cette blonde, elle continuait d’espérer que c’était une bonne personne.

« Je suis venue ici pour la mission. Je peux très bien régler cela par moi-même. Je n'aime pas la charité, ni la pitié donc si tu veux que je t'aide, il va falloir en payer le prix, comme n'importe quel contrat, quel qu'il soit. Ne sois pas un obstacle, ni une gêne sur ma route, sinon tu y passeras aussi. Quant à savoir si j'ai un cœur... Il est mort avec les miens.»

La réponse de sa tourmenteuse ne se fit pas attendre et elle provoqua un frisson dans le dos d’Aurore. Comment pouvait on devenir aussi aigri ? Cette femme a dû vivre des choses horribles dans sa vie pour en arriver à un tel ressentiment envers autrui. La proximité des deux femmes, permit à Aurore de la voir de près, ses longs cheveux blonds, son regard, l’obscurité qui y vit en couple avec la haine. La jeune héroïne se sentit empreinte de compassion ; malgré les pertes qu’elle a enduré Aurore a su rester positive, mais ça n’aurait pas été possible sans son père et sa sœur, des gens qui l’aiment. Cette démone comme l’appelle Léo a dû tout perdre, c’est au moment où elle était au plus bas et que personne n’était là pour la relever qu’elle emprunta la mauvaise voie pour devenir ce qu’elle est aujourd’hui. Un petit sourire compatissant se forma sur le visage d’Aurore, et une larme perla sur sa joue qu’elle s’empressa d’essuyer avec son petit mouchoir bleu brodé de roses multicolore et de licornes.

Aurore laissa ensuite la démone et l’homme parler, elle les écoutait, mais avait du mal à se concentrer, plein d’idées fusaient dans sa tête elles concernaient Léo, les cheveux du vieil homme, le meilleur moyen de faire plaisir à sa nouvelle copine de mission pour lui faire comprendre que des gens l’aimaient, elle se demandait aussi si son chapeau était le meilleur choix vestimentaire. Aurore ne parvint à se reconcentrer que lorsque le vieil homme mentionna les 500 araignées, ça faisait beaucoup d’araignées sans aucun doute, mais la jeune fille avait confiance dans le nouveau duo qui venait de se créer. Elles n'auraient qu’à suivre les instructions données par le monsieur ; contourner la route principale et tuer la mère nette propre et efficace.