Une brise agréable m’enveloppait d’une odeur que j’avais appris à aimer. Ma fenêtre entrouverte laissait entrer ce bon matin provenant de la nature. Dans la moiteur de mes draps, j’inspirais longuement dans la lumière délicate de l’aurore. Le parfum des fleurs parsemant allégrement Crocus me faisait office d’odeur. Mais non, une autre odeur s’attardait sur ma peau. Olivier était libre, il gambadait dans les plaines de l’espérance et le départ de cette fidèle monture avait marqué l’arrivée dans ma vie d’un homme tout vêtu de noir, à l’humour accrocheur et aux rares sourires.

C’est le pas léger et le sourire accroché aux lèvres dans cet après-midi de printemps florissant que je mis une chemise dont le dos était de dentelle, affichant à travers les mailles blanches ma marque de guilde or et ocre, couvrant mon dos comme le ferait aussi bien des ailes. Je complétais ce chandail léger comme une caresse d’une jupe du même blanc cassé, parsemé de petites fleurs bleues et mauves. Je chaussais mes pieds de ballerines blanches, serra contre ma taille ma ceinture avec ma pochette de cuir sur ma droite, pour tirer mes cartes et je descendis vers le hall de ma chère guilde, ma lyre sagement au repos sur mon lit défait alors que j’abandonnais ma chambre. Dévalant joyeusement les escaliers, je tressais ma tignasse blonde en une longue queue-de-poisson me tombant sur l’épaule gauche jusqu’à mes hanches. Je saluais les gens qui peuplaient le hall, innocente, versatile, heureuse et filais sous le soleil cuisant de cette fraîche et délicate après-midi.

Je saluais les passants, traversais des ruelles coquettes, conversaient avec certains marchants. Puis, comme je suis humaine, mon ventre grondait. Heureusement, un petit café à la devanture vitrée proposait des gâteaux au fromage. Salivant déjà, j’entrais, saluant vivement les deux serveurs qui n’étaient pas laids à regarder, mais le visage de Jet se superposa aux leurs. J’eu un rire discret. Me hissant sur un tabouret de la terrasse sous un parasol, je commandais un thé glacé, un gâteau au fromage et quelques chocolats. Cette collation n’était qu’un coupe-faim, car le souper devait bientôt approcher et il n’y a rien de mieux que de manger avec sa famille.

Je levais le visage vers la serveuse et eu un sourire éphémère, bref comme une lumière qu’on allume. Trop de rose à mon goût, mais la couleur s’agençait à sa peau mordorée. Elle déposait mes sucreries et la salive me montait automatiquement à la bouche. Tirant une gorgée de ma tasse de thé avec un contrôle de moi-même incroyable, selon ma propre perspective. Lorsqu’elle mentionna ma nouvelle maison, je lui adressais un sourire rayonnant, un petit rire discret. Elle avait toute mon attention. Lamia Scale ? Les sirènes ? Ou était-ce les lamies ? Je ne pouvais pas me décider, mais décidément, cette beauté exotique était plus une sirène qu’une lamie…

Je me rappelais de ma rencontre avec Jet, qui remontait seulement à quelques jours. J’aurais aimé me la jouer cool comme lui et avertir la damoiselle bonbon de ma probable méchanceté, mais elle me savait fille des tigres et elle m’avait dévoilée son allégeance pour le vert, même s’il ne se reflétait pas dans son habillement. Lorsque sa main conduit mon regard vers sa marque de guilde, je m’attardais plus sur l’ourlet de sa jupe que sur le tatouage blanc, comme pour prouver mon intérêt souvent… Euh… Déplacé… Lorsque sa main entras dans mon champ de vision, brisant le charme de cette satanée jupe rose bonbon, j’eu un petit sursaut, ris de bon cœur et lui serra doucement la main, un sourire scotché aux lèvres.

Kalindra Flashman. Je cherchais dans mon esprit. Non, je n’étais pas assez callée dans le monde de la magie pour connaître chaque membre de chaque guilde. Lorsque j’aurais accomplis cela, je n’aurais officiellement plus de vie. Surtout si je mémorise leurs guilde, leurs lieu d’habitation, l’estimation de leurs pouvoirs magiques, leurs magies respectives, leurs âge et aussi leurs petit surnom personnels. Je ris intérieurement. Je m’imaginais, mes cheveux attachés en queue de cheval haut perchée, soigneusement lissés, une chemise de scientifique blanche tombant sur mes cuisses, une blouse noire sous une jupe crayon ocre et des talons-haut de cuir noir. Des lunettes à large monture, des stylos dans la poche droite. Une bombe sensuelle, mais une scientifique des guildes, donc inutile, et probablement mentalement dérangée… Mais l’image me faisait rire.

Alors, pendant qu’elle débitait son cliché de ‘’pour vous servir’’, je lui serrais la main, tout sourires. J’entrouvris mes lèvres, le regard pétillant, attendis quelques secondes, puis, ensuite, je m’exprimais.

« - Vais-je ? Bon, pendant que tu prends une inspiration et que je puisse parler, je me nomme Hannah Clouds, toute aussi enchantée. J’ai une question pour toi, Kalindra Flashman de Lamia Scale, ne serait-il pas plus simple de travailler proche de ta guilde ? Ou prendre des missions ? Ou faire la serveuse au sein de ta guilde ? Crocus est quand même à une bonne distance de Lamia Scale, non ? Je ne pense pas qu’il y ait une magie des portails qui existe pour traverser une telle distance… »

J’éclatais de rire, repris possession de ma main après une légère pression, délicate, rien de violent, je pris une gorgée de mon thé. Chaud, coulant dans ma gorge. On avait ajouté une lampée de miel car cette sensation était caractéristique au miel. Délicieux. L’érable se mariait parfaitement avec la verveine et la mangue. Avec la touche de miel et de… Cannelle ? Je crois… Tout était parfait. Avec ma fourchette qui scintillait au soleil tellement elle était propre, j’entamais mon gâteau. Mélangé avec ce thé fumant, le gâteau au fromage, servit avec un coulis de fruits des champs me fondait littéralement dans la bouche. J’expirais un soupir d’extase gourmet et regardais ma serveuse. Je relevais un sourcil.

« - Je dois être assez chanceuse pour rencontrer deux membres de Lamia Scale en si peu de temps ! »

J’éclatais d’un rire franc, ponctuant ma déclaration de ma bonne humeur naturelle et attrapa un chocolat que je jetais dans ma bouche ouverte. Sous mes dents, la coquille sucrée laissa déverser le caramel onctueux qu’il gardait au secret. Je fis un claquement de langue satisfait. Cet établissement allait avoir un bon pourboire et j’en parlerais à tous les membres de la guilde. Cette trouvaille du jour, en plus de ma rencontre avec un autre mage, me mettais définitivement de bonne humeur.

J’éclatais d’un rire franc et long alors que je voyais son expression se fonder dans une mimique de réflexion assez hilarante. Je gobais un chocolat et lui en lançais un alors qu’elle me demandait quel était son nom. Je me demandais si je voulais la taquiner, car ce Yuki devais être pour elle un être soit haïs ou adoré pour qu’elle réagisse si violement. Définitivement, Kalindra était de ses personnes sur terre que j’aime taquiner. Je lui offris un sourire scintillant.

« - Non, il est magnifique, grand, musclé, cheveux noirs, regard fuyant, aussi noir que ses cheveux en broussaille. Une aura de puissance et de ténèbres. Si ton Yuki est une copie conforme de cette description, alors oui, je vais te le voler, ton Yuki ! »

Je pris une gorgée de thé en réprimant mal un rire moqueur, mais je ne pus m’empêcher d’éclater de rire. Je me repris rapidement.

« - Non, il s’appelle Jet, tu le connais ? »

J’eu un regard innocent, comme si je ne savais que le terrain sur lequel je m’engageais était glissant, mal assuré et que je ne savais pas trop comment réagir. Je me rappelais d’Alex, un homme qui avait réchauffé mes nuits de l’été de mes dix-huit ans. Je me devais, avant d’entreprendre quoi que ce soit avec Jet, je me devais de finir et boucler cette relation. Je me sentais un peu mal pour Jet, lui avoir donné des espoirs avant d’être même disponible. J’attendais toujours la réponse de Kalindra.